Sous la surface

Légende.

Sur Explosions in the sky, "First breath after coma"

Je les sens venir comme on sent un mal de gorge annonciateur d’un rhume.

Ce n’est même pas tellement dû à mon travail en fait, mais plutôt à la fatigue engendrée par mon travail.

Ce petit voyage m’a épuisée finalement. Et la semaine d’avant, passée sans dormir, aussi. Malgré les vitamines et tout, je ne dors pas assez. Je suis une petite nature probablement. Ou au contraire je suis trop exigeante envers moi-même. C’est ce que disait ma psy. Incapable de supporter lorsque mes forces diminuent. Ces moments de faiblesse où l’on devrait lutter deux fois plus, je les laisse m’envahir et me dominer, j’abandonne le combat. Je me rends. Toujours beaucoup trop tôt. Il me manque cette hargne qui fait tenir encore quand on est à moitié mort. Il me manque ce courage de héros. Il me manque l’obstination.

On s’obstine pour réussir, non ? S’il n’y a pas d’enjeu, alors on abandonne. Je croyais pourtant avoir redéfini ma vision des choses.

Je ne veux plus avoir d’ambitions et c’était là ma seule ambition, il y a à peine quelques jours. Juste vivre ma vie telle qu’elle est, sans penser à la changer. Parfois ça ne semble pas suffire.

Je les sens venir, et j’abdique avant même qu’elles soient vraiment là.

Mon corps réclame du repos et c’est mon esprit qui s’épuise déja.

C’est toujours ainsi que ça commence : quand je voudrais juste rester chez moi à ne rien faire jusqu’à ce que ça aille mieux.

Mes images positives ne m’accompagnent plus. Je vais tout faire pour les ranimer. M’endormir ce soir avec elles en tête, seulement elles.

Il y a bien sûr d’autres petites contrariétés. Mon homme à moi m’échappe sans même que j’aie l’envie de le retenir. Peut-être bien qu’il n’est dans ma vie que pour m’accabler… C’est ce que je ressens en tout cas.

Alors sur ce plan-là, une autre silhouette apparaît en filigrane. Celui qui reste toujours à la fin quand tous les autres s’effacent. Et si je n’en suis pas malheureuse, j’en suis tout de même mélancolique. Ce grand point d’interrogation, ce grand pari perdu d’avance… S’il y en a bien un que je n’irai pas chercher, c’est lui. Mais lui, viendra-t-il ? Je ne le pense pas, mais c’est une éventualité intéressante à considérer. J’aime bien y penser, même si ça veut dire que je flirte avec la tristesse. Ca devient une sorte de vie parallèle, une légende.

Il y a des états qui manquent cruellement d’originalité.

Je vais peut-être regarder à nouveau mon dernier film préféré. Ou mon premier. Ou mon deuxième. J’ai besoin de fictions en ce moment, mais de fictions familières. Celles qui me disent qui je suis, au fond. Je suis perdue dans ma nouvelle vie, je suis perdue dans mes nouveaux désirs. Pourtant, si j’en suis arrivée là, c’est certainement parce que j’ai fait des choix. Si j’ai décidé d’être satisfaite de ma vie, c’est certainement parce que j’ai su à un moment qu’elle était ce qu’il y avait de mieux pour moi.

C’est dans ces moments idiots que j’ai l’impression d’avoir besoin de bras autour de moi. Mais je suis persuadée que c’est une illusion engendrée par la fatigue physique. Illusion que je vais combattre par une autre illusion. J’ai un besoin factice de bras, ce soir je m’endormirai dans des bras factices.

Je n’ai pas besoin de ce genre de réconfort, je n’ai pas besoin de ce genre de relation humaine. Trop éphémère, trop problématique. Trop malsain. Pour moi, en tout cas.