Sous la surface

La seule personne...

La seule personne avec laquelle on vit, finalement, c’est nous-mêmes.

Je veux dire, le seul visage que l’on verra jusqu’à la fin, ou la seule voix qu’on entendra, le seul corps que l’on touchera toujours…

La seule pensée qui nous répondra, toujours.

On dit qu’il faut être son meilleur ami. Se prodiguer l’affection et les conseils comme on le ferait pour son meilleur ami.

N’est-ce pas une façon déguisée de dire que nous serons toujours seuls ?

Et aussi que nous sommes tous doubles, au moins, voire multiples ?

Seule avec moi-même, je me dis que cette barrière invisible qu’est la pensée ne pourra jamais être franchie, que jamais personne n’entrera en connexion totale avec moi. Que pourtant j’aimerais bien. Que pourtant tant d’autres ont le même rêve que moi.

Que moi non plus, je ne pourrais jamais étreindre un être dans sa globalité, que toujours cette partie mystérieuse m’échappera.

Je suis la seule personne au monde à pouvoir me comprendre…

N’est-ce pas une idée déchirante ?

Et pourquoi l’est-elle à ce point ? Quelle part de sagesse ou de connaissance avons-nous perdue pour que ce désir insensé prenne forme ?

Pourquoi y a-t-il un manque ? Pourquoi existe-t-il ?

Lorsqu’on voit une pièce cassée, on devine la partie manquante, ou du moins, on sait qu’il y a eu quelque chose, avant, puisque la pièce cassée ne fonctionne plus sans l’autre partie, n’a plus de sens sans l’autre partie…

Il manque quelque chose, même si l’on ne sait pas quoi.

De là sont nées toutes ces légendes : Dieu, l’âme soeur, les extra-terrestres, la télépathie…

Toujours ce phantasme de ne pas être seuls.

Parce que le manque, nous le sentons bien. Nous distinguons tous, chacun à notre manière, qu’il doit y avoir autre chose.

Mais nous ne savons pas quoi…