Sous la surface

Les yeux grand fermés vers les Açores

Mais voilà que ma cyclothymie reprend le dessus.

Le dimanche soir, comme par hasard…

Et non, ce n’en est pas un, mais peu importe.

Envie d’autre chose. Envie de plus, de mieux. Est-ce si grave ? Si prétentieux ?

Ou plutôt envie de différent. J’ai envie d’autre chose.

Cet "autre" qui me poursuit. Depuis bien jeune, maintenant que je regarde en arrière. Cet "autre" que nous avons cherché de concert, S. et moi, ensemble ou chacun de notre côté, sans parvenir à le coincer.

Des années…

A-t-il renoncé, lui aussi ?

Je programme une nouvelle quête. Je l’organise, raisonnablement, méthodiquement. Je sais que bientôt je vais me l’accorder, cette pause. Dans trois ou quatre ans, si tout va bien. Mais bordel, que c’est long !

Là, tout de suite, j’aimerais être sur la tombe de Rimbe. C’est une idée surprenante, puisqu’elle ne me vient pratiquement jamais. J’aimerais y être et boire une petite bière, et pleurer comme auprès d’un ami. C’est aussi une idée débile, parce que je présume qu’il doit y faire un peu froid.

En fait, tout ça, c’est à cause de John Lennon. J’ai une chanson de lui dans la tête "Oh my love". Et je me dis que moi aussi j’ai envie d’avoir les yeux grand ouverts et tout le toutim…

Sauf que moi, dernièrement, j’ai plutôt les yeux grand fermés. Histoire de survivre.

J’ai envie de pleurer. Mais je n’y arrive pas. (Thème récurrent)

J’ai peur… J’ai peur de me planter. J’ai peur de vraiment, vraiment faire fausse route. Et de perdre mon temps. Qui est précieux.

Parce que je joue avec mon temps. Je temporise. Chaque année, je dis que c’est la dernière, et je suis toujours là.

Et puis je disparaîtrais. Et puis j’irais me cacher dans l’archipel des Açores. Et personne ne me retrouverait. Et je dirais bonjour au soleil, jusqu’à ce que l’océan nous submerge, tous.

Et je suis toujours là. Soumise aux angoisses des autres qui sont devenues les miennes.

La prisonnière que je refusais de devenir. Elle est en face de moi tous les matins, dans le miroir.

À force de ne pas vouloir gérer sa vie, on gère très mal sa vie.Je pourrais bien me demander encore à quel moment j’ai foiré, mais en fait je m’en fous. Tout ce que je veux à présent…

Aller de l’avant. Réussir à me libérer. De tout. Du regard des autres. De l’angoisse.

"Ce n’est parce que les choses sont difficiles que nous avons peur; c’est parce que nous avons peur que les choses nous paraissent difficiles."

Sur le vol aller, il y avait une fille. On a bien déliré. C’est plus tard que j’ai compris qu’elle avait pété les plombs, largué les amarres et viré tous ses téléphones. Boulot, famille, amis, elle avait tout envoyé chier. Peut-être pour un moment seulement, mais c’était bien ça… Etonnant qu’elle soit venue délibérément auprès de moi. Il n’y a pas de hasard...

Depuis longtemps, plus un départ qui ne soit programmé dans ma vie. Depuis la nouvelle. Depuis ce fichu truc qui fait que je ne me sens plus libre. Depuis que je ne veux plus risquer de leur faire peur. Ca fait combien maintenant ? Trois ans et demi.

On dirait que le destin ou je ne sais quoi a enfin trouvé le bon bâton pour me faire tenir tranquille.

Je suis perdue…

Je ne suis pas en accord avec moi-même depusi trop longtemps. Et j’ai de plus en plus de mal à garder les yeux fermés.

Grand fermés.

... Et puis je disparaîtrai. Et puis j’irai à Charleville via les Açores, ou aux Açores via Charleville. Et puis je reviendrai. Et je m’arrêterai regarder l’eau couler avec ses tourbillons, sur un pont que j’aimais bien. Et puis je trouverai un champ et j’y planterai ma tente et je regarderai les étoiles, s’il y en a. Et puis je disparaîtrai. Et puis j’irai pleurer devant une danseuse de flamenco. Et je boirai. Beaucoup. Et puis je reviendrai. Et je repartirai.

Et je disparaîtrai. Un jour. Vraiment.